BADIOU ET LA JEUNESSE: installation vs transgression

Résumé d’une conférence d’Alain Badiou aux lycééns sur LA VRAIE VIE.

A l’intérieur de chaque jeune il y a deux ennemis de la vraie vie:

1) La vie consiste à consommer et à jouir, à avoir des satisfactions

La vraie vie ce sont des moments, des morceaux. C’est quand on se sent vraiment vivre. La vraie vie c’est avoir autant de ces moments intenses que possible. La vraie vie c’est la vie intense, la vie des plaisirs. Le problème avec cette conception c’est que ça éclate la vie, c’est la vie éclatée en moments bons et mauvais, la durée se perd. La vraie vie c’est une vie en morceaux, la collection des moments intenses. C’est l’idée de la transgression.

2) La vie c’est réussir, trouver une bonne place.

C’est l’idée de la durée, de la continuité, de la stabilité, la vraie vie c’est s’installer. Pour réussir son installation il faut une stratégie. Il faut un bon départ dans la vie, de bonnes conditions initiales, commencer très tôt. C’est l’idée du pouvoir et du calcul.

cf. ZAZIE DANS LE MÉTRO. « Je veux être institutrice… pour faire chier les mômes ». Ce qui compte dans la vie c’est le pouvoir, de prendre sa revanche. On calcule sa vie. La vraie vie c’est la collection des jouissances vs calculer sa réussite.

Le point commun de ces deux conceptions, c’est l’oubli de l’autre.

cf. Rimbaud, « le poète de la jeunesse ». Il a exploré les deux tentations: brûler la vie vs installer sa vie. Brûler vs s’installer, ou mage vs paysan:

« Moi ! moi qui me suis dit mage ou ange, dispensé de toute morale, je suis rendu au sol, avec un devoir à chercher, et la réalité rugueuse à étreindre ! Paysan ! » (Rimbaud, Une Saison en Enfer, Adieu).

Rimbaud: le poète errant vs le commerçant sédentaire.

La jeunesse est contradictoire, parce qu’elle est travaillée par les deux tentations: brûler vs installer. Romantique vs ambitieux. La société a peur de ses jeunes, elle ne sait pas quel équilibre va s’établir entre la révolte et l’ambition. Comment s’installer sans perdre l’intensité de l’existence?

Est-ce que l’obligation de s’installer va m’empêcher de jouir de la vie? Il faut s’installer, sinon c’est le suicide lent, la vie intenable, la démolition. Donc il faut une installation qui admet des moments d’absence, de transgression, de départ et de retour. Il faut une installation critique, qui admet que le monde où on est installé n’est pas forcément bon.

La vraie vie implique la possibilité de sortir des contraintes de la vie installée. Non pas de les refuser, parce que ça c’est suicidaire. Mais d’en sortir.

cf. Platon, il faut toujours être prêt à sortir de la caverne, à modifier l’équilibre de la vie.

S’installer vs partir. Non pas une installation figée mais une navigation.

cf. ANABASE – mot qui veut dire monter et redescendre – par Saint-Jean Perse. Il n’y a pas de contradiction nécessaire entre l’intensité et l’installation, entre bâtir et naviguer. On peut s’installer dans un bateau mouvant au lieu d’une maison.

Le monde doit changer pour accueillir la jeunesse, les jeunes qui vont inventer le nouveau monde. Le monde doit être dès le départ pensé selon la mobilité. C’est ça la vraie vie: à l’intérieur du vaste monde dans lequel je suis nécessairement installé, ma pensée garde l’idée de la navigation, de l’ailleurs, de la différence, de la possibilité de nouvelles intensités et de nouvelles expériences de vie.

Entre les deux tentations, la vie installée et la vie fragmentée, il faut ré-inventer la vie, inventer une vie nouvelle, une vie qui accepte d’être son propre mouvement, son propre désir.

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